Coup de cœur N° 126

Des murs …. partout !

Je ne vais pas disserter sur le recueil de Jean-Paul Sartre : « Le Mur », ni sur les nombreux romans ayant le mot « mur » dans leur titre, mais plutôt sur son utilisation fréquente.

Dans un article paru en 2019 sur « Le Figaro », le lexicologue Jean Pruvost, analyse le « mur » …

Voici quelques extraits de cet article :

« Il est assurément bien court le mot « mur », à la manière des mots usés par un usage multiséculaire. À la fois réalité abrupte et symbole fort anciens, issu du latin «murus», il a tout d’abord désigné précisément «le mur d’une ville», celui édifié pour sa «fortification», ce qui le range au départ parmi les synonymes de «défense»...

« Le mot «mur» est entré dans la langue française à la fin du Xe siècle, et on ne retient tout d’abord que les «murs d’enceinte», les «murs d’une place forte». Ces «murs de fortification» auront une longévité certaine. » …

« Il faut attendre le XIIe siècle pour que le «mur» devienne aussi celui d’une maison. Dans notre premier dictionnaire monolingue, celui de Pierre Richelet, si le «mur» reste encore sobrement défini comme «muraille», sera aussi évoqué le «petit mur», mais également le «mur mitoyen», le «mur de séparation», et le «mur de face», entendons de façade. Les murs de la maison ont enfin pris leurs marques » …

« Le pas étant franchi du mur de fortification au mur d’un bâtiment, il importe de signaler qu’hélas un type de mur persiste, celui destiné à empêcher les personnes de sortir ou d’entrer dans un pays. L’un des premiers fut peut-être le Mur d’Hadrien, édifié au IIe siècle après Jésus-Christ en Angleterre par l’Empereur Hadrien, mur supposé protéger l’Empire contre les Barbares. Il n’a évidemment pas tenu. Tous les murs finissent par se lézarder » …

Au 21ème siècle, quand vous utilisez Facebook, vous écrivez sur un « mur » !

Donc, de tous temps, le « mur » rentre dans nos vies :

- Dans le sport : un mur au football, un mur d'escalade, un mur d'obstacles en équitation, les murs en cyclisme, le mur à la pelote basque.

- Chez les artistes, mur : lieu d’expression libre.

- En aviation, le mur du son.

- Qui n'a pas entendu ou prononcé : « Les murs ont des oreilles », « Être le dos au mur », « Parler à un mur », « Se taper la tête contre les murs », « Raser les murs », « Aller droit dans le mur », « Être entre quatre murs »

- Citons les murs célèbres : - les murs de Jéricho – le mur des lamentations à Jérusalem – le mur d'Hadrien au nord de l'Angleterre – le mur de la peste en Vaucluse – le mur des fédérés du cimetière du Père Lachaise – le mur du ghetto de Varsovie – le mur de l'Atlantique – le mur de Berlin (ou le mur de la honte) – le mur des sables au Maroc – le mur Etats-Unis-Mexique – le mur pour la paix à Paris – Le mur des Disparus à Perpignan -

- Puis il y a aussi les murs peints (notamment à Lyon), maintenant les murs tagués.

- En maçonnerie, le mur aveugle, le mur banché, le mur de pignon, le mur de façade, le mur de refend, le mur de soutènement, le mur mitoyen, le mur porteur …

- Mais également en météo, le mur de pluie.

… Mur de fumée, mur d'incompréhension, mur de l'argent …

- Dans les romans, le mur a inspiré des auteurs : - Frôler les murs – Hors les murs – Les murs blancs – Les murs de sang – Raser les murs – Les murs dansent ...

- De nombreux films ont « mur » dans leurs titres : - Le mur des ténèbres – Derrière les murs – Entre les murs – La tête contre les murs – Droit dans le mur – Dos au mur ...

« Mur » a donné lieu à des citations :

« Tout homme a vu le mur qui borne son esprit » (Alfred de Vigny)

« L'argent dresse son mur entre les hommes » (Eric-Emmanuel Schmitt)

« Un élu, c'est un homme que le doigt de Dieu coince contre un mur » (Jean-Paul Sartre)

« L'universel c'est le local moins les murs. » (Miguel Torga)

« Graffitis: les murs n'ont pas d'oreilles, mais une mémoire » (Sylvain Tesson)

« Les hommes construisent trop de murs et pas assez de ponts «  (Isaac Nexton)

Terminons par cette phrase de Robert Frost : « Avant de construire un mur, j'aimerais savoir ce que je dois garder dehors ou bien dedans, à qui je risquerais de porter préjudice » (cité dans l'épisode 4 de la sérire Wayward Pines de Night Shyamalan)

Roland Bérenguier

Pierrevert – Novembre 2022